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photographie et ethnographie réflexive

Jean-Robert Dantou, Florence Weber & Ninon Bonzom - 23 mars, 2023

la langue originale de cet article est l'anglais

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à propos de la contribution

Quelles sont les ressources mobilisées au quotidien par des personnes qui font face à de grandes difficultés liées à l’accroissement des inégalités sociales entre territoires ? Pourquoi certaines personnes en voie de précarisation, et non d’autres, se déplacent-elles d’une région à une autre ? Comment ces déplacements, subis ou choisis, contribuent-ils à les enfermer ou à leur redonner prise sur leur vie ? Une perte de revenus ou l’espoir d’un quotidien plus facile peuvent entraîner des déplacements résidentiels vers des zones où le coût de la vie est plus bas (loyer, alimentation), où des proches sont disponibles pour partager le travail domestique dans sa conception la plus étendue. Rester sur place lorsque ses voisins partent, devoir quitter un quartier où le coût de la vie a fortement augmenté, voir son quartier s’appauvrir, se vider, s’effondrer, voir les quartiers voisins s’enrichir, autant de phénomènes qui obscurcissent le rapport à l’avenir et entraînent des émotions telles que colère, honte ou tristesse. Ces questions sont posées par une recherche collective en sciences sociales qui examine le rôle des dynamiques économiques et des pouvoirs publics dans l’effondrement sélectif de portions du territoire français.

L’enquête photographique menée à Tonnerre (Yonne) entre 2017 et 2022 est le premier dispositif mis en place par cette recherche collective. Elle s’intéresse aux conditions à réunir pour que la photographie puisse constituer un outil heuristique efficace au service d’une entreprise de connaissance scientifique. Formellement, le travail s’inscrit dans une lignée partiellement interrompue pendant la seconde moitié du XXe siècle, celle d’alliances entre photographie et sciences sociales nouées un siècle plus tôt en Europe (Thomson et Smith), en Australie (Gillen et Spencer) et aux États-Unis (Boas et Hastings). Elle défend une pratique photographique et ethnographique relevant de l’artisanat plutôt que de l’art, d’un métier plutôt que d’un geste artistique, pour une production de connaissances au service de la cumulativité des savoirs et de la coopération interdisciplinaire plutôt que de la recherche concurrentielle d’innovation.

Sur la plateforme zoom.able, l’essai visuel se déploie sur trois niveaux. Le premier calque présente une cartographie de la ville, qui fait apparaître les structures importantes pour l’enquête : des pictogrammes signalent les portes d’entrée sur le territoire, les institutions de maintien qui permettent la survie des personnes, les lieux vacants qui jouent un rôle clé dans l’arrivée de populations précarisées, les refuges qui offrent un abri contre le froid et la pluie.

Le deuxième calque présente une sélection de portraits dont les légendes renseignent sur les différentes modalités d’installation à Tonnerre au cours des dix dernières années. Le dispositif implique les personnes photographiées à plusieurs étapes de la production. Ce sont elles qui choisissent les lieux des prises de vue. Elles choisissent aussi les lieux d’attachement auxquels leur portrait est relié sur la carte, soit parce qu’elles y passent du temps, soit parce qu’elles y placent leurs espoirs ou leurs doutes. Elles participent enfin au travail d’écriture des légendes accompagnant les photographies, qui explicitent leur rapport singulier au territoire.

Le troisième calque suit deux logiques : les lieux identifiés sur la carte renvoient à une documentation photographique sur le territoire, tandis que chaque portrait renvoie aux ressources mobilisées pour affronter le quotidien ainsi qu’à des situations photographiques. Il s’agit ici, dans une optique épistémologique, de restituer l’écart entre le monde observé et sa représentation photographique, afin de rappeler que les matériaux photographiques, pour être utilisables, doivent être rapportés au contexte singulier de leur production : distance entre le photographe et son modèle ; effet de la monochromie ; hors-champ ; gestuelle de l’opérateur pendant l’interaction de prise de vue.

crédits

auteur.ices : Jean-Robert Dantou, Florence Weber et Ninon Bonzom

photographie et direction artistique : Jean-Robert Dantou, photographe et doctorant SACRe ENS, Université PSL, Agence VU’

direction scientifique : Florence Weber, sociologue et anthropologue, ENS, Université PSL

design graphique : Ninon Bonzom

coordination et gestion de projet : Léa Saint-Raymond, ENS, Université PSL

avec le soutien de :
Publié avec le soutien du ministère de la Culture – Bibliothèque nationale de France (grande commande nationale : « Radioscopie de la France : regards sur un pays traversé par la crise sanitaire »)École universitaire de recherche Translitteræ (programme « Investissements d’avenir » ANR-10-IDEX-0001-02 PSL et ANR-17-EURE-0025) ainsi qu’avec le soutien de l’EA SACRe-PSL.

Voir la section « droits et références iconographiques » pour consulter les légendes des images

droits et références

droits et références iconographiques

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Jean-Robert Dantou, Florence Weber et Ninon Bonzom. Carte de la ville de Tonnerre. 2021. Crédits © 2021 Ninon Bonzom. Reproduit avec autorisation.

Jean-Robert Dantou. Portraits de la série photographique Arriver. 2019-2021. Photos © 2019-2021 Jean-Robert Dantou/SACRe ENS PSL/Agence VU’. Reproduit avec autorisation.

Jean-Robert Dantou. Portraits de la série photographique Tenir. 2019-2021. Photos © 2019-2021 Jean-Robert Dantou/SACRe ENS PSL/Agence VU’. Reproduit avec autorisation.

Jean-Robert Dantou. Portraits de la série photographique Photographier. 2021. Photos © 2021 Jean-Robert Dantou/SACRe ENS PSL/Agence VU’. Reproduit avec autorisation.

W152. Bouchra, quartier des Prés-Hauts, janvier 2021.

W101. Olivia, quartier des Prés-Hauts, décembre 2020.

W114. Ludovic, quartier des Prés-Hauts, décembre 2020.

W132. Éric Felder, quartier des Prés-Hauts, janvier 2021.

W135. Sébastien, quartier des Prés-Hauts, janvier 2021.

W141. Gérald, quartier des Prés-Hauts, janvier 2021.

W086. Luca, canal de Bourgogne, novembre 2020.

W206. Isabel, quartier de l’Europe, février 2021.

DAJ_8140. Patrick, quartier des Lices, juin 2019.

W100. Bachir, hauteurs de Tonnerre, décembre 2020.

DAJ_8276. Giuseppe Trotti, rue du Général Campenon, mars 2019.

W169. Lugrid Valdi, « La Cascade », février 2021.

W152. Bouchra arrive à Tonnerre en février 2020, à l’âge de 43 ans, après plusieurs mois passés dans un centre d’hébergement à Migennes. Son portrait apparaît sur la carte au niveau de la falaise de calcaire qui domine la ville, qui correspond à l’horizon qu’elle voit depuis la fenêtre de sa chambre, dans le quartier des Prés-Hauts. Elle décrit cette colline comme un « horizon à dépasser », métaphore pour évoquer ses difficultés quotidiennes à sortir de sa chambre et de son appartement. Derrière son portrait apparaît une série de captures d’écran qui mettent en perspective le temps long de la prise de vue.

W101. Olivia arrive à Tonnerre en septembre 2020, à l’âge de 30 ans, après une hospitalisation longue à Auxerre. Son portrait présente une scène ordinaire du quotidien, pendant laquelle elle écoute de la musique éthiopienne sur son téléphone portable. Olivia a souhaité que sa photographie apparaisse sur la carte au niveau du Pavillon Bleu, une brasserie dans laquelle elle va quasiment tous les jours pour acheter son tabac et retrouver un ami.

W114. Ludovic arrive à Tonnerre en 2010, à l’âge de 40 ans, après un passage de plusieurs années par la rue. Son portrait est réalisé à son domicile en fin de journée, au mois de décembre, à la lumière de l’hiver, devant la table où il explique avoir l’habitude de s’asseoir pour penser. Son portrait est relié à trois photographies de la série Photographier prises au lieu-dit de « La Cascade », qui interrogent l’enjeu de la distance dans la relation photographique.

W132. Éric Felder arrive à Tonnerre en 2010, à l’âge de 42 ans, après avoir vécu deux ans dans un foyer à Auxerre. Son portrait apparaît sur la carte au niveau du Bar des Sports, où il aime s’arrêter pour boire un café en terrasse : « Ce matin j’en ai pris huit ou dix, des cafés. J’en bois un, je fume une cigarette, et j’en commande un autre ». Éric n’aime pas beaucoup son portrait, il trouve qu’il penche trop la tête, que c’est déséquilibré. Son portrait est relié à une photographie de la série Photographier, mise en abyme de l’opération de découpage du monde dont procède l’acte photographique.

W135. Sébastien arrive à la Résidence Accueil du quartier des Prés-Hauts en 2020, à l’âge de 43 ans. Il a souhaité que son portrait apparaisse sur la carte au niveau de La Cascade : « Ça ne me plaît pas, Tonnerre, y a pas de boulot, c’est mort. Le seul endroit tranquille, c’est La Cascade ». Son portrait est relié à deux photographies interrogeant l’un des paradigmes de la relation photographique : le choix de l’arrière-plan.

W141. Gérald est originaire de Tonnerre, il est arrivé à la Résidence Accueil du quartier des Prés-Hauts il y a cinq ans, à l’âge de 47 ans. Il pose ici sur le lit de sa chambre, qu’il décrit comme le lieu où il passe l’essentiel de son temps. Gérald a souhaité que son portrait apparaisse sur la carte au niveau de « La Glacière », une grotte située à proximité de la maison dans laquelle il est arrivé à Tonnerre à l’âge de trois ans. Son portrait est relié à une photographie de la série Photographier, dans une mise en abyme du geste photographique.

W086. Luca arrive à Tonnerre à la fin du mois d’octobre 2020, à l’âge de vingt ans, après un mois passé à la rue à Auxerre. Son portrait est relié à trois formes de résistance qu’il décrit pour parler de son quotidien : la pratique régulière de la musculation, un couteau pour se défendre, et la pratique du dessin. Luca a quitté la ville quelques jours après notre rencontre, et nous avons perdu son contact depuis. Son portrait apparaît sur la carte à l’endroit où a eu lieu la prise de vue.

W206. Isabel arrive à Tonnerre depuis le Portugal en août 2013, à l’âge de 41 ans, pour rejoindre son mari qui a trouvé du travail dans les vignes à Chablis quelques mois plus tôt. Elle décrit son exil et l’arrivée à Tonnerre comme une épreuve difficile. Son portrait est rattaché à une séquence de photographies réalisées quelques instants plus tard, et pour lesquelles elle a réuni ses enfants et son mari. Son portrait apparaît sur la carte à l’emplacement de l’église Notre-Dame de Tonnerre : « Chaque dimanche ou presque, je viens allumer une bougie et faire une prière pour pouvoir un jour repartir dans mon pays ».

DAJ_8140. Patrick arrive à Tonnerre avec sa compagne Céline en mai 2015. Il a alors 60 ans, et elle un peu moins de 40. Originaires de la proche couronne parisienne, ils s’installent à Tonnerre après avoir été hébergés pendant plusieurs années chez une cousine à Saint-Ouen. Ils se marient à Tonnerre le 14 mai 2016. Le portrait de Patrick apparaît sur la carte au niveau de La Cascade, où ils aiment se promener rencontrer des amis ou pique-niquer. Le dernier calque présente une série de photographies qui montre à la fois la circulation des photographies dans l’enquête et la famille proche de Patrick (sa femme, son frère et ses neveux).

W100. Bachir arrive à Tonnerre à la fin du mois de novembre 2020, à l’âge de 54 ans, après avoir été hébergé quelques mois chez des amis dans une ville voisine. Il ne reste que quelques jours à Tonnerre, avant de trouver un logement social à une cinquantaine de kilomètres de là, dans la ville de Joigny. Deux photographies sont visibles derrière son portrait : une scène de repos sur le téléphone portable dans le logement d’urgence du Centre Communal d’Action Sociale et un portrait en tenue de boxe, sport qu’il pratique quotidiennement pour garder une bonne condition physique. Son portrait apparaît sur la carte à l’endroit où a été réalisée la prise de vue.

DAJ_8276. Giuseppe Trotti habite dans la rue du Général Campenon depuis une soixantaine d’années. Réputé pour être l’un des meilleurs danseurs de la ville, il pose ici en mars 2019 en tenue de bal dans la rue devant chez lui. Chaque matin ou presque, Giuseppe prend son vélo pour aller acheter du pain et faire quelques courses, avant de rentrer préparer le déjeuner pour sa femme. Il a souhaité que son portrait apparaisse sur la carte au niveau de la rue du Général Campenon, qu’il décrit comme le lieu dans lequel il a fondé sa famille. Son portrait est relié à une série de photographies de la série Tenir qui, d’une part, met en scène une routine du matin structurant ses journées, et d’autre part, renvoie au rythme de la relation d’enquête : Jean-Robert Dantou passe environ une semaine toutes les six semaines à Tonnerre, et chacune de ses journées de terrain commence par une photographie de Giuseppe sur son vélo, au même angle de rue, généralement entre 8h30 et 9h.

W169. Lugrid Valdi arrive à Tonnerre en mars 2020, à l’âge de 40 ans, après plusieurs mois passés dans un centre parental à Auxerre. Son portrait est relié à une série de photographies réalisées quelques minutes plus tard, sur les bords de l’Armançon, où elle aime venir se promener. Lugrid a souhaité que son portrait apparaisse sur la carte au niveau de la gare : « Je n’avais pas l’habitude de voir une gare abandonnée. Ça m’a affectée de ne pas trouver un agent pour demander à quelle heure passait le train. J’avais l’habitude de Paris, j’étais vraiment perdue ici. »

références et bibliographie

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SCIENCES SOCIALES

Gramain, Agnès et Florence Weber. 2003. « Modéliser l’économie domestique. » In Charges de famille. Dépendance et parenté dans la France contemporaine. Édité par Séverine Gojard et al., 9–42. Paris : La Découverte.

Gramain, Agnès et Samuel Neuberg. 2009. « Réagencements territoriaux récents et conduite des politiques sociales à l’échelle locale. » Travail et Emploi 119 : 77–87.

Piketty, Thomas. 2013. Le Capital au XXIe siècle. Paris : Seuil. https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/AGramain_SNeuberg-2.pdf

Schwartz, Olivier. 2011. « La pénétration de la “culture psychologique de masse” dans un groupe populaire : paroles de conducteurs de bus. »  Sociologie 4,  vol. 2 : 345–361.

Weber, Florence. 2017. « Le souci du territoire. Un espoir pour le XXIe siècle. » Présenté lors de la conférence « Ethnographies et engagements », Rouen, 9 novembre : https://www.academia.edu/43931280/Le_souci_du_territoire_Un_espoir_pour_le_XXIe_si%C3%A8cle

 

PHOTOGRAPHIE

Berlière, Jean-Marc et Pierre Fournié. 2011. Fichés ? Photographie et identification, 1850-1960. Paris : Perrin.

Bourgois, Philippe et Jeff Schonberg. 2009. Righteous Dopefiend. Berkeley : University of California Press.

Dantou, Jean-Robert, Florence Weber, Solène Billaud, Christian Caujolle et al. 2015. The Walls Don’t Speak. Les murs ne parlent pas. Heidelberg : Kehrer.

Evans, Walker et James Agee. 1941. Let Us Now Praise Famous Men. Boston, MA  : Houghton Mifflin.

Gillen, Francis James et Walter Baldwin Spencer. 1899. The Native Tribes of Central Australia. Londres : Macmillan and Co.

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Lange, Dorothea et Paul Taylor. 1939. An American ExodusA Record of Human Erosion. New York : Reynal & Hitchcock. https://doi.org/10.4000/gradhiva.3532

Muratet, Myr. 2020. Paris Nord. Paris : Building Books.

Pataut, Marc. 2012. Humaine. Textes de Jean-François Chevrier, Véronique Nahoum-Grappe et Philippe Roussin. Cherbourg-en-Cotentin : Le Point du Jour.

Robert, Denis et René Taesch. 1997. Portrait de groupe avant démolition. Paris : Stock.

Sander, August. 1929. Antlitz der Zeit. Sechzig Aufnahmen deutscher Menschen des 20. Jahrhunderts. Préface par Alfred Döblin. Munich : Kurt Wolff/Transmare.

Thomson, John et Adolphe Smith. 2020. La Vie à Londres. Traduit par Jean Dupont. Paris : Éditions françaises.

Le Collectif d’enquêtes politiques et Marie-Pierre Brêtas, Pierre Cabanes, Daniel Colson, Didier Demorcy, Ursula Gastfall, Marc Monaco, Isabelle Stengers. 2016. Vivre, expérimenter, raconter. Vaulx-en-Velin : Les Éditions des Mondes à faire.

pour citer cet article

La citation de cet article est au format Chicago

Dantou, Jean-Robert, Florence Weber et Ninon Bonzom. 2023. « Tenir : photographie et ethnographie réflexive. » Revue .able : https://able-journal.org/fr/tenir

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